Sara Belpaese - Blog sur la mode & culture italienne

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La dolce vita : un art de vivre plus actuel que jamais

Un espresso brûlant en terrasse, les cheveux dansant dans le vent à bord d’une Vespa ou encore l’air cuisant de la côte Amalfitaine : la dolce vita, ça vous parle ? Trois mots qui roulent comme une promesse, celle d’un art de vivre où le plaisir n’est pas un luxe, mais une nécessité.

Pourtant, derrière cette élégance un brin nostalgique et cette expression devenue un mantra, que reste-t-il du souffle originel de Fellini, de Rome la décadente et du glamour des années 60 ? Et surtout, pourquoi ce mythe italien connaît-il un regain d’amour dans l’univers des tendances ? Plus qu’un simple hashtag ou une esthétique Pinterest, la dolce vita se voit comme un antidote au vacarme contemporain et ça, les créateurs l’ont bien compris.

Les origines de la dolce vita

Tout le monde l’utilise, mais savez-vous vraiment d’où vient-il ? Retour sur l’Italie d’après-guerre où cette dernière panse ses plaies, tout en donnant naissance à l’esthétique la plus désirée du XXᵉ siècle. 

En effet, entre 1950 et 1963, l’Italie connaît un véritable miracle économique appelé le “boom economico”. Ce miracle transforme le pays encore rural, marqué par la misère et les stigmates du fascisme, en une puissance industrielle moderne. Des marques comme Fiat et Vespa voient le jour et deviennent les symboles d’un nouvel art de vivre à l’italienne, séduisant bien au-delà des frontières.

Les grandes villes italiennes s’électrisent et Rome devient le théâtre d’un véritable tourbillon glamour. Journalistes, stars hollywoodiennes et aristocrates s’y croisent, telles qu’Audrey Hepburn et Brigitte Bardot. La capitale développe également un complexe de studios cinématographiques appelé Cinecittà, capable de concurrencer les États-Unis et leur imposant Hollywood. C’est d’ailleurs dans ces studios que naît le célèbre film “Dolce Vita” de Fellini.

Cependant, ce qui nourrira vraiment cet art de vivre italien, ce sont les tensions internes du pays en forme de bottes. Une Italie encore tiraillée entre tradition et modernité, entre ébullition économique et quête de sens, donnant naissance aux principes de la dolce vita. Une esthétique où le luxe n’est pas encore ostentatoire, mais résolument sensuel, incarné et vibrant.

Et si la dolce vita n’était pas si dolce ?

« La Dolce Vita » – Fellini (crédit photo : ADRC)

En effet, le terme dolce vita à un double sens : celui hollywoodien idéalisé par William Wyller dans Vacanze Romane (1953) et celui italien complexe et ambiguë par Fellini dans « La Dolce Vita » (1960). L’un filme Rome à hauteur de rêve, l’autre à hauteur de vertige.

Dans Vacanze Romane, William Wyller expose Rome comme une carte postale : lumineuse, romantique et enfantine. Une ville dans laquelle on peut tout oublier — son rang, ses devoirs, sa solitude — le temps d’un gelato et d’un slow en terrasse. L’Italie en toile de fond et un décor idéalisé pour un amour impossible, mais tendre. La dolce vita de Wyller rime avec liberté et beauté.

Chez Fellini, la dolce vita est plus italienne, charnelle et trouble. Rome n’est plus un décor, mais un labyrinthe d’ombres, de néons et de nuits trop longues. Elle est la définition même de l’Italie d’après-guerre, comme évoqué précédemment, qui se cherche entre tradition et modernité, entre culte du corps et vide spirituel.

Au final, la dolce vita c’est aussi ça, ce qu’on projette versus ce que l’on vit vraiment.

Une philosophie de vie

La dolce vita est également le symbole d’une esthétique du plaisir lent. Ici chaque geste est une célébration. Jamais vous ne prendrez de café dans un gobelet. Vous le savourez dans une tasse, tout en bronzant en terrasse et où l’amour ne s’expédie pas en stories de 15 secondes.

Dans un monde qui glorifie la vitesse, la performance et l’instantané, la dolce vita s’affirme comme une contre-esthétique. Elle donne de l’importance au temps, au goût et à la contemplation. Elle nous invite à ralentir pour mieux ressentir. C’est d’ailleurs pour cela que la gastronomie italienne repose sur des principes similaires comme la qualité des ingrédients, la simplicité et la ritualisation du repas. En d’autres mots, la dolce vita est le contre-modèle du productivisme, voire l’opposition au stress contemporain et à la fast life. Un art de vivre dans lequel la lenteur n’est pas une faiblesse, mais une force, voire un luxe ultime : celui de prendre son temps.

Cette lenteur se traduit également dans la mode italienne par une élégance fluide : les tissus (lin, coton, soie), les silhouettes (robe midi cintrée, chemise nouée, pantalon palazzo) ou encore les couleurs (ocre, ivoire, bleu azur et vert olive). Tout dans le vestiaire italien laisse penser à la dolce vita.

Et ce n’est sans compter sur les maisons italiennes telles que Dolce&Gabbana, que nous retrouvons la plupart de ces principes. Entre les citronniers de Capri et les majoliques de Sicile, Dolce & Gabbana a transformé la dolce vita en un défilé permanent. 

Campagne Dolce & Gabbana

Le corps méditerranéen est alors mis en valeur et la féminité baroque est assumée. La dolce vita devient dans la mode un vecteur de désir, d’évasion et de luxe accessible. Souvent utilisé comme coup marketing par de nombreuses marques, d’autres maisons italiennes déclinent ce thème comme un héritage culturel.

Plus qu’une tendance mode, la dolce vita est un vrai statement. Elle influence notre façon de vivre et de voir le monde. Avec la dolce vita, tout devient slow, épuré et conscient. Elle fait d’ailleurs naître des mouvements comme la slow life, le slow travel et la slow fashion, repris par de nombreux influenceurs. Aujourd’hui, on décide de prendre le temps, de redonner de la valeur à chaque geste et de préférer la qualité à la quantité. Par exemple, le slow travel se définit comme l’idée d’habiter un lieu, s’immerger, plutôt que de le consommer. Quant à lui, le slow fashion a pour principe de dire adieu à la fast fashion et de privilégier un savoir-faire local, une histoire. Créateurs comme consommateurs tentent de ne plus suivre la tendance mais de construire un style qui résiste au temps. Ce nouveau regard a permis à la dolce vita de s’actualiser et de largement se diffuser.

Pourquoi avons-nous besoin de dolce vita aujourd’hui ?

Face au chaos que représente le monde actuel, nous ressentons le besoin d’authenticité, de beauté et de respirer. La dolce vita est simplement une réponse esthétique et émotionnelle à un besoin d’hyperconnexion et d’angoisse climatique. Nous pouvons même dire qu’elle est une forme de résistance et un retour à l’essentiel tout en étant stylé. À l’heure où la vitesse, la laideur et la brutalité semblent triompher, choisir l’élégance, la douceur et la lenteur, c’est peut-être ça, le vrai luxe.

Et vous, qu’en pensez-vous ?


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